Nous ne sommes pas encore à l’heure du bilan, mais s’il fallait que je retienne quelque chose depuis mon élection en 2012, ce serait les formidables délais qui peuvent exister entre une attente sociale identifiée et sa réponse législative.
Bien souvent, j’entends de la part d’habitants qu’il faudrait “faire ceci” ou “légiférer pour cela”. Et trop souvent je ne peux que répondre que les députés ont bien identifié le problème et qu’il y travaillent. “C’est en cours, nous allons faire des propositions, nous avons trouvé une solution”…
Mais ces réponses qui imposent de la patience ne peuvent être entendues alors que notre société est habituée à une livraison dans les 24 heures du produit commandé sur internet… Plus que de pédagogie, notre système démocratique impose l’acceptation du temps et de la patience.
Lorsque le parlement adopte fin 2013 le pacte de compétitivité et de solidarité, l’objectif est de redonner des marges de manoeuvre aux entreprises en leur proposant un crédit d’impôts pour leur permettre d’être plus compétitive – le fameux CICE – et donc d’embaucher.
Mais dès 2014, les dirigeants de grandes associations dont l’activité, bien que non lucrative s’inscrivait dans un champs concurrentiel, nous ont fait savoir que le CICE introduisait des distorsions de concurrence.
Entre une entreprise d’aide à domicile et une association qui rendait le même service, la première était avantagée, ce qui n’était pas le but de la manoeuvre !
Très vite, nous avons vu qu’il était nécessaire de rétablir un équilibre. La première étape a pu être assez rapidement décidée : une mesure spécifique en faveur des associations non soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) correspondant à une baisse du montant de leur taxe sur les salaires. Dès 2015 l’abattement sur la taxe sur les salaires (TS) passait de 6 000 à 20 000 euros.
Mais cette mesure était limitée aux associations employeuses de taille moyenne et ne répondait pas à notre objectif. Il a donc fallu réfléchir, faire preuve d’imagination et trouver un la bonne solution dans un environnement budgétaire contraint, pour manier l’euphémisme…
Je dois avouer – sans fausse modestie – que le principe d’un crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires est d’origine parlementaire et que je n’y suis pas pour rien…
Après un intense travail de lobbying auprès du gouvernement – hé oui, le lobbying peut aussi aller dans ce sens ! – nous avons convaincu les ministres de la nécessité d’agir. Les choses se sont ensuite relativement “rapidement” enchaînées.
En février 2016, le secrétaire d’Etat au budget reprend notre idée d’une transformation du CICE pour les structures non lucratives. En octobre, c’est le Premier ministre qui confirme au monde associatif la création de ce crédit d’impôt et, reconnaissant que l’initiative vient des députés, il me confie la charge de rédiger un amendement en ce sens. C’est alors que le travail technique commence. Aidé des services de l’assemblée et du ministère, nous rédigeons un texte que j’aurais la charge de défendre en commission des finances. Adopté par la commission, il est ensuite voté en séance dans la nuit du 18 novembre. Mais ce n’est que le 22 novembre, lors de l’adoption à l’occasion du vote solennel du budget que ce dispositif est – enfin – définitivement adopté.
Cet allègement des charges pour les associations et les mutuelles de 4% de leur masse salariale jusqu’à 2,5 smic est une formidable avancée pour l’économie sociale ! Au delà du montant – 600 millions d’euros (un milliard si l’on compte les 300 Millions déjà adoptés en 2013 et les 100 Millions résultant de l’usage du CICE par les organismes fiscalisés), c’est la reconnaissance du rôle majeur que jouent associations et mutuelles dans l’économie du pays pour la cohésion sociale et le développement de l’emploi.
Mais il aura fallu près de 3 ans pour voir aboutir cette solution. Un travail de très longue haleine que ne perçoivent pas toujours les citoyens et qu’il nous appartient de toujours mieux expliquer.